Pour chercher un emploi, payer ses impôts, trouver un logement, prendre un rendez-vous médical ou tout simplement s’informer, il est difficile aujourd’hui de se passer d’Internet. Pourtant, certains citoyens – ni des marginaux, ni des rebelles – ne vont que rarement sur le web et se déclarent mal à l’aise avec le numérique. Ces « illettrés » du numérique, qui ont des difficultés à utiliser les nouvelles technologies, représentent une part non négligeable de la population.

L’illectronisme – pour illettrisme numérique –, est l’impossibilité de se servir des outils informatiques, notamment des sites internet, par manque de connaissances sur le sujet. Il toucherait

15 % de personnes en France, selon les chiffres officiels, alors que, dans le pays, le nombre d’illettrés est estimé à 7 %. Une récente étude CSA pour le Syndicat de la presse sociale (SPS) révèle que près d’un quart des Français se sentent « mal à l’aise avec le numérique ».

L’accès au numérique : un droit pour tous

Même si les plus de 70 ans sont un peu plus nombreux que les autres à avoir du mal à se servir d’Internet, l’illectronisme est un phénomène plus largement répandu qu’on pourrait le croire. De plus, beaucoup n’osent pas toujours avouer leurs difficultés ou leurs réticences.

« Cette étude a permis de mettre des chiffres sur des intuitions, explique Philippe Marchal, le président du SPS. Nous avons quand même été surpris par le fait que cela touchait toutes les régions, urbaines ou rurales, les hommes comme les femmes, et toutes les catégories socioprofessionnelles, y compris des cadres supérieurs. »

Les jeunes, eux aussi, se trouvent parfois désemparés lorsque l’utilisation d’internet devient moins ludique.

« Parmi les jeunes, 15 % sont aussi en retrait par rapport à Internet. Même s’ils surfent apparemment facilement sur le web, ils y font presque toujours la même chose et n’utilisent en réalité qu’une faible partie des possibilités du numérique. » précise P. Marchal.

Loin d’être hostile au progrès, le SPS s’inquiète néanmoins et pointe le risque d’exclusion sociale d’une partie de la population.

« Trop de personnes restent sur les côtés, regrette Philippe Marchal. Certains se découragent et finissent par renoncer à une démarche, une requête, un droit. »

Décomplexer et « décomplexifier »

Dans une société qui vit à l’heure du digital, ne pas savoir utiliser les outils numériques est un véritable handicap au quotidien. Pour compenser le manque de compétences en informatique, apprendre à ces personnes démunies à envoyer des e-mails, à faire des démarches sur internet, à commander un produit, etc., des initiatives voient le jour un peu partout en France.

L’association Emmaüs, par exemple, permet aux plus défavorisés d’accéder aux services en ligne par le biais du programme Emmaüs Connect et, depuis plusieurs mois, initie aussi un public plus large via des ateliers pratiques pour accompagner ceux qui débutent sur la toile.

Pôle Emploi, les départements, les mairies, les associations… ont également mis en place des formations pour que tous puissent enfin être autonomes et naviguer sans peine dans le monde du digital.
Il s’agit là d’un début de solution qui ne va malheureusement pas permettre à tous de se mettre à niveau. Le monde numérique reste encore compliqué. Bien souvent, la construction et l’ergonomie des sites internet ne rend pas facile la navigation.

Par cette étude, le SPS a souhaité alerter les pouvoirs publics, l’opinion publique et les acteurs du monde digital. Un colloque intitulé « Treize millions de personnes exclues du numérique : des idées pour agir » s’est déroulé à l’Assemblée nationale le 3 octobre dernier avec des spécialistes du sujet. In fine, un guide des bonnes pratiques devrait permettre de simplifier et de clarifier les sites et leur architecture, pour faciliter l’accès à internet à tout le monde.